La naissance de Shisupala
Dans le septième chant du Shrimad Bhagavata, il y a un dialogue très intéressant récité par Shri Shukadeva Gosvami sur la libération de Shisupala, tué par Krishna pendant le Rajasuya-yajna de Yudhishthira Maharaja. Shisupala était le cousin de Krishna, mais il détestait Krishna depuis sa naissance. À la première vue de Krishna, il se mettait à L’insulter, mais Krishna faisait toujours preuve de tolérance, sans montrer un quelconque signe de perturbation. Krishna promit à la mère de Shisupala, sa tante maternelle : « Je tolérerai cent insultes de la part de ton fils, mais J’agirai le jour où il aura franchi cette limite ».
Des rois du monde entier vinrent assister au Rajasuya-yajna de Yudhishthira. C’est une coutume védique selon laquelle les invités doivent être reçus et honorés comme Dieu. Ainsi une cérémonie d’honneur fut-elle prévue pour tous ces invités royaux. La question se posa de savoir qui recevrait l’adoration en premier. Bien que tout le monde dût recevoir la même adoration, les plus honorables de l’assemblée devaient être adorés en premier. Le même principe peut souvent être observé dans les temples indiens lors de la cérémonie de l’arati, lorsque la lampe à ghee offerte au Seigneur circule parmi les dévots assemblés. De même, pendant une Kumbha Mela, le mahant ou l’acarya le plus respecté entre dans le fleuve sacré du Gange avant tous les autres.
Après une longue discussion sur cette question, il fut finalement décidé que Bhagavan Shri Krishna devrait obtenir l’adoration de la première cérémonie, même si de grands sages comme Narada, Vyasa, Parashara, Vasishtha, Maitreya, Vishvamitra, Parasurama, Kashyapa et aussi de grands devas comme Indra, Varuna et des anciens comme le grand-père Bhishma étaient présents. Shisupala s’y opposa et commença à critiquer et à insulter Krishna. Krishna le toléra, mais Shisupala était impitoyable et plein de colère. Krishna lui rappela qu’Il était proche de la limite de Sa promesse faite à la mère de Shisupala, mais Shisupala n’y prêta aucune attention. Dès que Shisupala eut franchi la limite des cent insultes, Krishna invoqua Son Sudarshana Chakra et lui coupa la tête.
Puis, une chose étonnante s’est produite : l’atma de Shisupala sortit de son corps et fusionna dans le pied gauche de Krishna, signifiant que Shisupala avait atteint la libération de l’asservissement au monde matériel. Tout le monde, y compris le roi Yudhishthira, fut surpris en le voyant.
Yudhishthira demanda à Narada: « Comment se fait-il que Shisupala, qui était plein de haine envers Krishna, ait atteint la mukti, que même de grands sages atteignent rarement ? » Yudhishthira donna l’exemple du roi Vena, qui était également très critique envers Bhagavan Vishnu et qui fut tué par les sages, mais qui n’atteignit pas la mukti. En effet, il est largement admis que même entendre la critique de Bhagavan ou de Ses dévots est délétère au progrès spirituel, comme il est dit dans le Srimad Bhagavata :
nindāṁ bhagavataḥ śṛṇvaṁs tat-parasya janasya
vā tato nāpaiti yaḥ so ‘pi yāty adhaḥ sukṛtāc cyutaḥ
« Celui qui entend la critique de Bhagavan ou de Ses dévots et ne quitte pas cet endroit, tombera en perdant tout son mérite, que dire de la personne qui fait des critiques ? » (SB 10.74.40)
L’expression « quoi dire » (api) indique que celui qui critique Bhagavan ou Ses dévots rencontrera certainement une destination encore pire que celle qui est décrite.
Yudhishthira Maharaja demanda à Narada pourquoi Shisupala n’avait pas développé la lèpre sur sa langue ou n’était pas allé dans la région la plus sombre de l’enfer au lieu de se fondre dans le corps de Krishna. Il y a une déclaration populaire de la smriti : « Une personne fait face au résultat d’un péché très grave ou d’actes pieux dans cette vie même». Cela implique que Shisupala aurait dû recevoir sans délai la réaction de ses offenses.
Shisupala comme exemple de la raganuga-bhakti
Shri Narada donna ensuite une réponse très élaborée aux questions de Yudhishthira, une réponse qui contient le cœur du sujet de la raganuga-bhakti. Il expliqua que la critique, la louange, l’honneur et le manque de respect ne sont liés qu’au corps physique. Lorsqu’une personne se croit être le corps, elle considère les éloges ou la critique, l’honneur ou le déshonneur s’adressant au corps comme s’il s’agissait d’éloges, de la critique, etc., de sa propre personnalité et elle se sent ainsi exaltée ou en colère. Bhagavan n’a pas une telle mentalité dualiste qui provient d’une mauvaise identification avec les événements se déroulant dans la prakriti. De ce fait, les éloges ou les critiques faits par des personnes matérialistes ne L’affectent pas.
L’on s’identifie au corps physique à cause du manque de discrimination entre prakriti et purusha. Shri Jiva Gosvami dit que les personnes insensées critiquent les caractéristiques du corps, qui sont des produits du tamas et du rajas. Toutes ces critiques se font en réalité uniquement dans le domaine de la prakriti ou des gunas matériels, mais le corps de Bhagavan est au-delà des gunas de la prakriti. Par conséquent, une telle critique ne s’applique pas à Lui. De plus, Bhagavan ne s’identifie pas à la prakriti et à ses évolutions. Ainsi, une telle critique ne Lui cause aucune douleur. Dans la Bhagavad Gita, Shri Krishna dit qu’Il ne se révèle pas aux personnes matérialistes et reste couvert par le voile de yogamaya (BG 7.25).
Lorsqu’Arjuna a posé des questions sur les symptômes d’une personne qui a transcendé les gunas de la prakriti, Krishna a répondu:
« Une personne est au-delà des gunas de la nature si elle est égale en bonheur et en tristesse, [si elle est] située en elle-même, [si elle] considère une motte de boue, une pierre et un morceau d’or comme égales en valeur, si elle est semblable envers les objets et les situations favorables et défavorables, si elle est sobre et considère de la même manière la critique et l’éloge, si elle est égale en honneur et en déshonneur, [si elle] traite un ami et un ennemi de la même manière et a renoncé à tous les engagements ». (BG 14.24-25)
Si cela est vrai pour un jivan-mukta, une personne libérée vivant encore dans le corps matériel, alors par argument a fortiori, une critique semblable, telle que prononcée par Shisupala, n’influence certainement pas Bhagavan Shri Krishna.
Alors pourquoi Krishna tua-t-Il Shisupala ? Après tout, Il n’a pas été importuné par ses insultes car elles n’étaient pas liées à Lui. Krishna tua Shisupala pour son bénéfice, comme nous pouvons le voir dans le fait qu’en étant tué, Shisupala a atteint la libération. De plus, Krishna tua Shisupala au profit de ceux qui souffraient d’avoir écouté ses insultes lancées contre Krishna.
Contrairement aux êtres vivants conditionnés, le moi et le corps de Krishna ne sont pas différents, Il n’a de ce fait pas de corps matériel. Par conséquent, Il ne s’identifie pas à une forme matérielle quelconque se trouvant sous l’influence de l’ignorance, comme c’est le cas avec les êtres vivants ordinaires. C’est pourquoi, personne ne Lui est cher non plus, ni Il ne déteste personne, comme Il le dit lui-même dans la Bhagavad Gita :
« Je suis égal envers tous les êtres. Nul ne m’est odieux ou cher, mais ceux qui m’adorent avec dévotion sont en Moi et Je suis également en eux » (BG 9.29).
À suivre
info@jiva.org for inquiries about Jiva Institute and guesthouse bookings
For website question please use our contact-form»
380 Sheetal Chaya
Raman Reti, Vrindavan
UP 281121, India
© 2017 JIVA.ORG. All rights reserved.