Le mot « pratishtha » signifie « réputation », « gloire », « renommée », « célébrité », « position élevée », etc. Nous en avons tous le goût. Nous travaillons pour elle et nous nous sentons heureux en l’obtenant.
Par Satyanarayana Das Babaji
Le mot « pratishtha » signifie « réputation », « gloire », « renommée », « célébrité », « position élevée », etc. Nous en avons tous le goût. Nous travaillons pour elle et nous nous sentons heureux en l’obtenant. Pour certains, c’est la motivation principale de leur vie. Ils sont prêts à sacrifier leur vie pour leur propre pratishtha ou même pour celui de leur famille, de leur pays, voire de leur équipe sportive préférée !
Cependant, dans les cercles de Vaishnavas le pratishtha est un mot redouté, en particulier dans la communauté des Gaudiya Vaishnavas. Notre dicton populaire est « pratiṣṭhā sūkarī-viṣṭhā », ce qui signifie « le pratishtha est un excrément de porc» et, soit dit en passant, c’est d’un porc indien dont on parle, et non d’un cochon de ferme. Les porcs indiens vivent principalement en mangeant des excréments humains. Les selles sont le produit du corps le plus abominable, alors comment peut-il y avoir quelque chose de plus détestable que les selles de porc : les excréments d’une créature qui mange des excréments ?
Pourquoi le pratishtha est-il si vilipendé par les Vaishnavas ? Quel est le problème avec la renommée, la célébrité et le prestige ? Ces phénomènes sont si détestables car ils vont complètement à l’encontre du caractère d’un Vaishnava. Les Vaishnavas se considèrent comme des dasas (esclaves ou serviteurs) de tout le monde. Un Vaishnava préfère se décrire comme un dasanudasa (esclave d’un esclave).
Pourquoi les Vaishnavas se comportent-ils ainsi ? Ils le font car ils désirent la bhakti, et la bhakti repose sur l’humilité. L’humilité (le fait de ne pas accorder d’importance à soi-même) est le premier fondement implicite de la bhakti, ou de l’amour. C’est pourquoi Shri Caitanya Mahaprabhu a dit que pour pouvoir vraiment s’engager dans le nama-sankirtana, l’humilité en est la condition la plus importante. Sans humilité, le nama-sankirtana devient un spectacle au lieu d’être un service agréable offert à Krishna.
Le pratishtha est plus dangereux aujourd’hui qu’il ne l’a jamais été auparavant. Dans le passé, il n’était pas aussi facile de devenir célèbre, mais avec les médias sociaux d’aujourd’hui, nous avons l’impression qu’il est possible de devenir célèbre du jour au lendemain. Il est possible d’utiliser Facebook, Twitter et d’autres programmes similaires pour se faire connaître, faire connaître ses opinions et attirer des abonnés. Nous pouvons publier des vidéos sur YouTube et attirer ainsi des abonnés. Même sans faire l’effort de contacter physiquement les gens, nous pouvons nous asseoir dans notre chambre et entendre nos louanges résonner dans le monde entier.
Le pratishtha est une chose fondamentalement négative, ce qui n’est peut-être pas si évident d’après la traduction générale du terme. Le mot « pratishtha » est formé à partir de la racine verbale √stha avec l’ajout du préfixe prati-. La racine √stha signifie « force », « stabilité », « position debout », etc. Le préfixe prati- signifie « être en opposition » ou « contre » le sens de la racine à laquelle il s’ajoute. Ainsi, le mot « pratishtha » signifie littéralement « capacité à s’opposer ». Une personne célèbre se dresse contre des concurrents et reste debout pendant qu’ils tombent. De plus, cela s’applique également à ses partisans, car le raga (amour) et le dvesha (haine) sont les faces opposées d’une même pièce. Les partisans qui vous « aiment » ont aussi une certaine envie implicite, à moins qu’ils ne soient des dévots, au sens propre du terme. En effet, l’on constate souvent que les partisans les plus passionnés deviennent les pires ennemis d’une personne célèbre. Ainsi, si vous avez du pratishtha, vous ne pouvez jamais être à l’abri de la haine, de la rivalité et de l’envie auxquelles vous serez forcé de « vous opposer ».
Dans le monde matériel, l’envie (matsarya) est partout présente. C’est pourquoi le Bhagavatam la discrédite au tout début et met en avant son absence comme l’une des caractéristiques fondamentales d’un dévot. Cependant, le fait d’être célèbre suscite l’envie chez les autres. Ce n’est certainement pas une chose merveilleuse à réaliser pour un dévot qui veut répandre l’amour.
Toutefois, aucune de ces raisons n’est l’ultime raison pour laquelle les Vaishnavas détestent le pratishtha. L’ultime raison est que le pratishtha nous rend fiers et hautains, ce qui nous rend facilement et sérieusement offensants envers les autres. L’offense est le plus grand obstacle sur le chemin de la bhakti. Si un être humain n’est pas offensant, la bhakti sera pour lui un processus très facile, simple et heureux. La fierté est la cause principale d’un caractère offensant et le pratishtha est la cause principale de la fierté. C’est la raison pour laquelle le pratishtha a été comparé à la chose la plus détestable : l’excrément de porc.
Le pratishtha est très attrayant et, de ce fait, il est difficile de l’abandonner car il nourrit notre trésor le plus précieux : notre conscience de soi, ou ahankara, qui est si difficile à comprendre. Nous pouvons abandonner toutes sortes de choses agréables beaucoup plus facilement que nous ne pouvons abandonner le pratishtha. Même ceux qui renoncent au luxe, aux plaisirs, aux possessions, à la religion, à la famille, etc., s’accrochent toujours au pratishtha, autrement dit ils veulent acquérir de la notoriété et du respect grâce à leur renoncement.
Dans le Hari bhakti-vilasa, Shri Gopala Bhatta Gosvami décrit la discipline à suivre par un Vaishnava. Après avoir donné des instructions très élaborées et détaillées sur tous les aspects des devoirs d’un Vaishnava, il déclare qu’ils sont principalement destinés aux personnes riches, et non à ceux qui renoncent à la richesse. Ensuite, il dit au sujet du devoir principal d’un Vaishnava renoncé une chose que je considère comme une instruction très importante pour tout dévot contemporain :
sarva-tyāge’pyaheyāyāḥ sarvānartha-bhuvaśca te
kuryuḥ pratiṣṭhā-viṣṭhāyā yatnam asparśane varam
« La chose la plus importante est d’essayer de ne pas toucher l’excrément du pratishtha. Toutes les choses indésirables en découlent, même si vous avez renoncé à tout le reste ». (HBV 20.370)
Il est à noter que Shri Gopala Bhatta Goswami utilise le mot « essayer » (yatna). Il sait combien il est difficile d’abandonner vraiment le pratishtha et suggère ainsi que même l’effort sérieux pour y renoncer est d’une importance capitale.
Il y a une étrange ironie avec le pratishtha. Même si un dévot n’y a vraiment aucun intérêt et pratique la bhakti avec un cœur pur, en étant entièrement abandonné, le pratishtha sera toujours l’un des résultats naturels de cette pratique ! Pourquoi ? Cela s’explique par le simple fait que les grands Vaishnavas exhalent les qualités de Shri Krishna, le Tout-Attrayant. De ce fait, tout le monde est naturellement attiré par un véritable Vaishnava, qui devient ainsi célèbre.
Shri Vishvanatha Chakravarti mentionne le pratisththa parmi d’autres types d’anarthas, qu’il appelle le bhaktyotta-anartha, des difficultés qui proviennent de la bhakti.
Quel paradoxe ! Moins vous voulez du pratishtha, plus il se manifeste. La bonne nouvelle est qu’un dévot qui ne s’en soucie pas, ne le remarquera pas ou n’en sera pas dérangé. Les véritables Vaishnavas sont naturellement humbles, et cela se reflète dans leur comportement. Leur humilité est un résultat naturel et automatique de leur dévotion, et non quelque chose de pratiqué intellectuellement, ce qui peut parfois être un peu voyant.
Les véritables Vaishnavas ne sont plus influencés par le pratishtha. Ils ne l’aiment, ni ne l’abhorrent.
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