Les palabres sont la voie la plus rapide vers le suicide spirituel

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Nous entendons souvent dire que les Vaishnavas ne devraient pas faire de commérages. Nous savons tous que critiquer un autre Vaishnava est une grande offense, tout comme nous savons que critiquer notre guru est une grave offense.

Nous entendons souvent dire que les Vaishnavas ne devraient pas faire de commérages. Nous savons tous que critiquer un autre Vaishnava est une grande offense, tout comme nous savons que critiquer notre guru est une grave offense. Comme Sri Krishna exauce le souhait de Son dévot, ceux qui s’adonnent à la critique trouveront de nombreux soutiens sous forme d’autres dévots qui compatiront avec eux. Ainsi se sentiront-ils heureux et leurs convictions seront-elles validées. Peu de personnes qui critiquent se rendent compte qu’elles commettent une offense. Elles sont sur un navire qui est en train de couler, chaque session de commérages faisant un autre trou dans le navire, l’enfonçant plus profondément dans la boue de maya.

Les commérages sont une chose si facile et agréable : nous en faisons l’expérience tous les jours. Or, il est choquant de savoir qu’ils ont des conséquences si dures : « Ce que j’ai dit n’est pas si mal. J’ai tout simplement commenté ce que j’avais observé. Je ne fais que dire la vérité amère. En quoi dire la vérité peut-il être offensant ? C’est notre droit fondamental d’exprimer la vérité ! » Ainsi beaucoup se défendent-ils lorsqu’ils critiquent quelqu’un. Bien que nous ayons entendu dans d’innombrables conférences qu’il faut s’abstenir de critiquer, force est de constater que lorsque les dévots se rencontrent, les palabres sont la chose la plus naturelle à laquelle ils s’adonnent. Alors ils se demandent pourquoi ils souffrent, que ce soit physiquement, mentalement ou émotionnellement. Souvent, ils blâment une autre personne pour leurs problèmes, sans se rendre compte que leurs lèvres lâches et leur esprit non-maîtrisé sont la cause de leur propre souffrance. Il est surprenant de voir le manque de responsabilité de la part des dévots qui s’adonnent à des commérages.

En délibérant sur cette maladie très répandue, j’ai pensé que bien qu’il y ait une interdiction claire des commérages, il n’y en a pas de définition claire. Personne ne m’a jamais demandé de définir ce que sont les commérages. Cela me fait réaliser que probablement personne ne pense qu’il fait des commérages. À moins que nous ne sachions clairement ce que signifie le mot « commérages », nous ne considérerons pas nos commérages comme tels. Après tout, personne ne pense mal de soi. L’ahankara a une manière si merveilleusement fine de rationaliser nos comportements afin que nous ne nous sentions pas coupables lorsque nous faisons des commérages.

Que sont les commérages ?

Le mot sanskrit qui exprime le mieux l’idée de commérages est probablement « prajalpa ». Dans son Upadeshamrita, Shri Rupa Gosvami les compte comme l’un des six destructeurs de la bhakti. En effet, il commence le livre par « vaco vegam », le contrôle de la parole.

Le Trésor de la langue française définit le substantif « commérages » comme « [p]ropos futiles souvent malveillants ». Je suis d’accord avec cette définition, mais j’y ajouterais ceci : les ragots ne doivent pas nécessairement concerner la vie privée des gens, il peut s’agir simplement de toute déclaration exagérée, critique, méchante, désapprobatrice, douteuse ou fausse sur une personne quelconque. Si nous présentons un dévot sous un mauvais jour, alors ce sont des commérages. Un bon baromètre pour évaluer si nous critiquons ou non est celui-ci : pouvons-nous faire cette déclaration directement en face de la personne concernée ? Ce n’est pas un test infaillible des commérages car il peut y avoir certaines choses que nous n’aimons pas dire directement à la personne et pourtant en parler peut ne pas être des commérages. Cependant, ce test peut certainement nous protéger des commérages.

Pourquoi faisons-nous des commérages ?

Maintenant que nous sommes clairs sur la définition des commérages, il est important d’examiner ce qui pousse une personne à critiquer. Nous savons que c’est une offense, pourtant nous nous y adonnons. Il doit y avoir un certain avantage à le faire. Une personne bavarde pour deux raisons principales. 

D’abord, nous bavardons car nous nous sentons mal dans notre peau ou que nous nous sentons inférieurs à une autre personne. En rabaissant une autre personne, nous nous sentons mieux dans notre peau, cela nous donne un sentiment de supériorité par rapport aux autres. Les commérages sont le moyen le plus rapide et le plus simple de le faire. Il est beaucoup plus difficile d’essayer de s’améliorer. Faire un changement en soi demande beaucoup de travail et de temps, le résultat étant non garanti et venant plus tard. Il n’y a pas de délai défini après lequel nous pouvons attendre une amélioration se manifester. En revanche, les commérages sont faciles et leur résultat est instantané. Dans la vie spirituelle, critiquer s’apparente à boire de l’alcool ou à prendre des drogues dans le monde matériel pour se sentir mieux. Il n’y a vraiment aucune différence. Dans le monde matériel, lorsqu’une personne se sent en insécurité, déprimée, rejetée, seule, incomprise, isolée, laide, sans importance, insignifiante, mal-aimée, stupide ou exclue, elle veut engourdir ces sentiments le plus rapidement possible. Les drogues et l’alcool font l’affaire. Pour ceux qui ne consomment pas de drogues ou d’alcool, il existe d’autres solutions rapides comme le sexe, la nourriture, le chocolat, la caféine, la pensée négative/critique, le surmenage, le jeu ou même l’attachement à une autre personne.

Toutefois, les dévots ne consomment pas de drogues ou d’alcool et mènent une vie vertueuse. Alors que font-ils pour engourdir ces sentiments douloureux qui les suivent comme une ombre ? La réponse est la suivante : les commérages ! Les commérages sont également une forme de dépendance qui sévit dans les sociétés spirituelles. Nous laissons de côté nos dépendances à la nourriture, à l’alcool ou à une autre substance enivrante et nous la remplaçons par une dépendance aux commérages. Dans les deux addictions, c’est un problème de contrôle de la langue. Sur la voie spirituelle, nous ne faisons pas le vœu de ne pas critiquer, comme c’est le cas de l’alcool, de la drogue ou de la caféine. C’est une drogue tellement agréable et, de ce fait, facilement disponible. Tout ce que vous avez à faire est de trouver une autre personne susceptible d’y participer et vous y êtes prêts ! Cela ne coûte même pas d’argent et vous pouvez le faire n’importe où et n’importe quand. Quel fabuleux tour de maya que sont les commérages ! Il n’est pas étonnant que tant de personnes tombent dedans et ne semblent pas pouvoir s’en sortir.

La seconde raison pour laquelle les dévots critiquent est la jalousie. Elle pousse les gens à frapper les autres. La jalousie est une sensation de brûlure dans le cœur et le moyen le plus simple de s’en débarrasser est de critiquer. Lorsque deux personnes jalouses se rencontrent, leurs commérages deviennent un festin, elles s’y absorbent complètement, tout comme les grands dévots s’absorbent dans la Krishna-katha.

La jalousie se déclenche lorsque je vois quelqu’un qui a quelque chose que je veux. Cela peut être un seva, le fait d’être en compagnie avec le guru, des connaissances philosophiques, une beauté, une position, une tenue vestimentaire ou une bonne conduite de dévotion. Lorsque je perçois que je n’ai pas ce que les autres ont ou qu’ils possèdent quelque chose en plus grande quantité que moi, alors je deviens jaloux. Qui plus est, je ne réaliserai pas ou n’admettrai pas être jaloux. Les émotions telles que la colère et la tristesse sont plus visibles et par conséquent plus faciles à détecter chez soi ou chez l’autre, mais la jalousie est plus subtile et, de ce fait, plus difficile à percevoir chez les autres et même chez soi. Mais si je peux devenir suffisamment humble pour réaliser et accepter ma jalousie, alors j’avancerai rapidement sur le chemin de la bhakti. D’abord, je dois la reconnaître et ensuite prendre des mesures pour l’extirper. C’est le moyen de progresser, mais généralement, nous ne le reconnaissons pas. D’ailleurs, nous ne l’acceptons pas même si quelqu’un nous le fait remarquer, bien qu’il soit rare que quelqu’un nous le fasse remarquer en face. 

Si nous nous sentons jaloux, la bonne approche serait de faire une introspection et d’assumer la responsabilité de notre jalousie. Les grands dévots ne critiquent pas car ils ne sont pas jaloux. Cependant, ceux qui ne sont pas des dévots avancés seront aux prises avec des sentiments de jalousie de temps en temps. Un dévot sincère peut reconnaître la jalousie dans son cœur et n’essaie pas de rationaliser ou de prétendre qu’il ne l’a pas. Il utilisera la jalousie comme une occasion de s’améliorer. Au lieu de ruminer sur les défauts d’autrui, un dévot sincère fait un effort pour changer. Après tout, nous ne venons pas dans la vie spirituelle pour changer autrui, mais pour changer notre être. Au lieu de critiquer ceux dont nous sommes jaloux, mieux vaut les apprécier et reconnaître qu’ils ont quelque chose que nous aimerions avoir. Ainsi deviendront-ils une source d’inspiration pour nous et nous permettront-ils d’améliorer notre personnalité et d’avancer sur le chemin de la bhakti.

Un dévot sincère ne prend plaisir ni à critiquer ni à entendre les autres critiquer. À cet égard, Shri Bhishma donne le conseil suivant au roi Yudhishthira :

« Ceux qui ont la vision des principes subtils du dharma prononcent des paroles véridiques et dépourvues de violence et de calomnie. Leurs paroles sont exemptes de défauts tels que l’hypocrisie, la méchanceté, la cruauté et la médisance. Même en prononçant ces paroles, ils le font avec parcimonie et avec un esprit stable ». (Le Mahabharata, « Shanti-parva », 215.10, 11)

Dans la vie de l’ashrama, les commérages créent un sentiment très amer parmi les résidents. Ils atténuent l’ambiance de coopération et de service. De ce fait, Shri Caitanya Mahaprabhu conseille aux dévots d’être humbles, tolérants, respectueux et de ne pas aspirer à recevoir des honneurs d’autrui.

Satyanarayana Dasa

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    I throw myself at the feet of Krishna and it is up to Him what he does with me. I am not this body. I am part of his energy, so I give myself back to Him.

    — Babaji Satyanarayana Dasa
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