L’article suivant est fondé sur les anucchedas 172-173 du Bhakti Sandarbha. Dans ces deux anucchedas, Shri Jiva Gosvami décrit la shraddha comme la qualification de base d’un dévot.
L’article suivant est fondé sur les anucchedas 172-173 du Bhakti Sandarbha. Dans ces deux anucchedas, Shri Jiva Gosvami décrit la shraddha comme la qualification de base d’un dévot.
Selon Shri Krishna, il n’y a que trois chemins menant au bien ultime des êtres humains : « Ces trois yogas – à savoir le jnana, le karma et la bhakti – ont été enseignés par moi avec l’intention d’accorder le plus grand bien à l’humanité. Aucun autre moyen à part ceux-là ne peut être trouvé nulle part ailleurs ». (SB 11.20.6)
Dans les deux versets suivants, Il indique l’éligibilité pour les trois voies : « De ces trois méthodes, le jnana-yoga accorde le succès à ceux qui se désintéressent du fruit de leurs actions et qui les ont ainsi abandonnés, alors que le karma-yoga accorde le succès à ceux qui ne se désintéressent pas du fruit de leurs actions et qui désirent encore les fruits de telles actions. Cependant, pour une personne qui, par grande chance, a acquis la foi dans l’écoute de Mes récits et dans d’autres actes de dévotion similaires, et qui n’est ni complètement indifférente aux objets des sens ni trop attachée à eux, le bhakti-yoga lui accorde le succès». (SB 11.20.7-8)
La bhakti est prescrite pour tout le monde, personne n’en est interdit, mais elle requiert des qualifications spécifiques. Cela signifie qu’une personne n’est pas disqualifiée de la bhakti en fonction de sa naissance, de son sexe, de son âge, de sa nationalité, de son statut social ou de ses capacités physiques ou mentales.
Par exemple, tout le monde est autorisé à étudier l’ingénierie ou la médecine. Il n’y a pas de discrimination en fonction du sexe, de l’origine ethnique, de la couleur de la peau, etc. Cependant, tout le monde n’est pas admis à un programme d’études. Un collège particulier peut organiser un examen d’entrée pour évaluer le calibre du potentiel étudiant. De même, bien que la bhakti soit accessible à tous, une qualification spécifique est requise pour l’aborder. Tout comme le renoncement, ou l’impartialité, est l’éligibilité requise pour le jnana-yoga, l’absence de passion – pour le karma-yoga, la shraddha est l’éligibilité requise pour le bhakti-yoga.
La shraddha est sans aucun doute requise sur les chemins du jnana et du karma, car sans la shraddha, le pratiquant ne s’impliquera pas pleinement au processus interne ou externe. Sur le chemin de la bhakti, cependant, le shraddha est la seule cause permettant de l’emprunter et a de ce fait été spécifiquement désignée comme critère d’éligibilité. Sans elle, l’ananya-bhakti ne peut pas commencer, et même si elle est entreprise pendant un certain temps, elle sera abandonnée.
Shri Jiva Gosvami dit que la shraddha ne fait pas partie de la bhakti mais qu’elle est une qualification pour la bhakti. Ainsi, parfois même des personnes ignorantes qui sont dépourvues de shraddha peuvent accomplir accessoirement des actes de dévotion. Sinon, les êtres humains ne seraient pas en mesure de pratiquer la bhakti avant l’apparition de la shraddha. Or, ce n’est pas le cas. De plus, si la shraddha faisait partie de la bhakti, alors elle seule pourrait accorder la perfection sans qu’il soit nécessaire de s’engager dans un autre acte de dévotion. Cependant, cela n’est soutenu par aucune déclaration dans les écritures ou par l’expérience de quiconque. Par conséquent, la shraddha est comprise comme n’étant qu’un attribut (vishesana) du pratiquant éligible et c’est la shraddha qui pousse à se tourner vers la bhakti d’une manière exclusive.
Par conséquent, il est important de comprendre ce qu’est la shraddha, comment l’obtenir et quels sont ses symptômes. La shraddha est une croyance ferme dans l’importance des écritures, elle vient du fait d’être en compagnie de dévots. L’avènement de la foi dans l’écoute des récits sur Bhagavan et dans d’autres pratiques de dévotion signifie que la personne a développé une ferme conviction que cela seul est le bien suprême.
Sans la foi, un être ne peut pas être exclusivement dédié au chemin de la bhakti. La bhakti est puissante en elle-même et ne dépend de rien d’autre pour produire son résultat. De plus, elle ne dépend pas des injonctions védiques, comme c’est le cas pour les actes du karma-yoga. La bhakti peut être comparée au feu qui brûle quiconque le touche, que la personne connaisse ou non son potentiel à brûler. Tout comme brûler est le pouvoir du feu lequel est inhérent à sa constitution et lequel ne dépend de rien d’extérieur, comme une injonction védique par exemple, la bhakti est également indépendante et puissante.
Comme la bhakti est indépendamment puissante, pourquoi la shraddha est-elle nécessaire ? Shri Jiva Gosvami répond à cette question de deux manières. Premièrement, bien que le pouvoir de la bhakti soit inhérent, il ne se manifestera pas chez une personne au cœur mauvais et, par conséquent, de nature offensante. À cet égard, la puissance de la bhakti est comparable à la capacité de combustion inhérente au feu, qui est obstruée dans le cas du bois humide. Si le combustible est humide, ou en d’autres termes, impropre à l’utilisation, seule de la fumée apparaîtra, mais non le feu ou la lumière. Par conséquent, le dévot qui est entravé par une offense a besoin de pratiquer régulièrement la bhakti pour purifier son cœur, tout comme nous devons sécher du bois humide avant de pouvoir l’enflammer. Mais si quelqu’un na pas la foi, il n’aura pas l’élan de pratiquer la bhakti pour se libérer de l’offense et de son cœur impur. Deuxièmement, même si une telle personne pratique la bhakti, elle ne sera pas dédiée exclusivement à la pratique. Pour ces raisons, la shraddha est le critère d’éligibilité nécessaire pour l’ananya-bhakti.
Shri Jiva Gosvami précise que l’abandon à Bhagavan (sharanapatti) est le symptôme pratique et indubitable prouvant que la shraddha existe vraiment chez un individu. Plus loin (dans l’anuccheda 236), il sera expliqué qu’un tel abandon comporte six caractéristiques : résolution d’accepter ce qui est favorable à la dévotion, résolution de rejeter tout ce qui est défavorable, avoir la foi dans le fait que Bhagavan fournira une protection, accepter Bhagavan comme son soutien, s’offrir complètement à Bhagavan et développer l’humilité.
Si nous étudions les shastras, tels que la Bhagavad Gita et le Srimad Bhagavata, avec un dévot qualifié, alors nous développons naturellement la shraddha caractérisée par ces six qualités. Cela s’explique par le fait que nous trouverons des déclarations partout dans les écritures dans lesquelles Bhagavan promet de protéger Son dévot, ou bien nous lirons des histoires décrivant de telles choses. Par conséquent, entendre les shastras est essentiel au développement d’une foi ferme.
En dehors de saranapatti, dans cet anuccheda Shri Jiva Gosvami parle de plusieurs autres symptômes de la shraddha. Le deuxième symptôme de la shraddha est l’absence du sentiment d’être démuni (karpanya-abhava) en matière de relations mondaines ou conventionnelles (vyavahara). Cela signifie qu’un dévot n’agit pas de manière à susciter des sentiments de pitié chez les autres afin de leur procurer une aide matérielle. Un tel comportement est contraire à la shraddha.
Un dévot ne va pas mendier chez les riches. C’est une insulte à Bhagavan et cela est comparable au fils d’une personne très riche qui va chez un petit homme d’affaires et lui demande quelques euros. Si le père du garçon vient à le savoir, il se sentira insulté. Un dévot ne doit pas se sentir indigent devant des gens matérialistes. Ce n’est pas de l’humilité mais une faiblesse de cœur et le signe d’un manque de shraddha. Il faut se souvenir de la question rhétorique posée par Shuka : « Pourquoi les sages flatteraient-ils ceux qui sont aveuglés par leur richesse ? » (kasmad bhajanti kavayo dhana-durmadandhan, SB 2.2.5).
Le troisième symptôme de la shraddha est que le pratiquant accepte pleinement les déclarations des shastras qui décrivent les objets, les existants catégoriques, les qualités et les actions liés à Bhagavan comme étant non matériels, même s’ils peuvent ne pas sembler l’être à quelqu’un avec une vision mondaine. À titre d’exemple, Vrindavana est décrit comme un lieu spirituel, la demeure de Sri Krishna, mais lorsque nous le voyons, il ne semble pas différent de tout autre lieu. Cependant, un dévot le voit comme étant transcendant. Il n’a aucun doute à cet égard. Il en va de même pour la forme de Bhagavan dans le temple, des objets qui Lui sont offerts et ainsi de suite.
Bien qu’un dévot n’ait pas personnellement expérimenté le pouvoir de ces objets tels qu’ils sont décrits dans les shastras, il a la foi qu’ils possèdent effectivement un tel pouvoir. La raison en est la shraddha qui consiste à croire dans la signification sens des paroles des shastras. Le pouvoir de ces objets peut ne pas toujours être manifeste car Bhagavan ou la bhakti peuvent choisir de ne pas révéler leur pouvoir. Alternativement, leur pouvoir peut rester caché à une personne en particulier car les offenses de ce dernier entravent leur manifestation.
Dans ce contexte, un doute peut être soulevé : le Garuda Purana (« Preta-khanda » 47.52) déclare que celui qui se souvient de Krishna aux yeux de lotus devient purifié aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. Nous pouvons en conclure que si des personnes ont foi en cette déclaration, il n’est pas nécessaire qu’elles se baignent, ou si elles se baignent, elles ne doivent pas avoir foi en cette déclaration. Comment résoudre cela ? Shri Jiva Gosvami répond que dans de tels cas, l’exemple de grands sages, tels que Shri Narada et Shri Vyasa, devrait être considéré comme décisif. Ainsi, nous devons continuer à nous baigner malgré le fait d’avoir la foi dans ce verset, faire autrement serait un signe de manque de respect envers de tels sages. De plus, cela donnerait un mauvais exemple aux gens en général qui pourraient considérer le dévot en question comme une autorité. Cela implique également qu’il n’est pas seulement important d’étudier les shastras, mais de les étudier auprès d’un enseignant qualifié. Sinon, il y aura le danger de mal appliquer les déclarations des shastras et d’être ainsi impliqué dans une offense.
Le quatrième symptôme de la shraddha est que le dévot s’engage assidûment dans la bhakti. Il ne s’intéresse à rien d’autre. Il n’y a rien qui puisse dévier l’esprit d’un dévot qui est fermement établi dans la shraddha. Cela est vrai à la fois pour le dévot pratiquant et pour le dévot avancé. Le dévot pratiquant est impatient d’atteindre le stade de perfection impliquant la révélation immédiate de Bhagavan, et le dévot avancé savoure la bhakti à chaque pas et ne peut pas imaginer faire autre chose.
Le cinquième symptôme de la shraddha est qu’un dévot est très sincère et direct. Plus tôt (dans l’anuccheda 153), la malhonnêteté, ou l’hypocrisie (kautilya), était décrite comme l’un des cinq principaux effets des offenses. En revanche, la shraddha aboutit à la simplicité. Un dévot n’a aucun désir de nom et de renommée. Par conséquent, un vrai dévot ne fait aucun effort pour les obtenir. Comme dit le proverbe : « L’honneur personnel n’est rien d’autre que les excréments d’une truie », pratishtha sukari-vishtha.
Le sixième symptôme de la shraddha est qu’un dévot évite soigneusement les offenses, en particulier la critique ou le manque de respect envers les grands dévots de Bhagavan.
Le septième symptôme est qu’un dévot ne fait aucun effort pour obtenir le plaisir des sens. Si, cependant, un dévot se voit offrir l’opportunité d’un plaisir matériel en vertu d’un karma méritoire passé et est incapable de s’en débarrasser à cause de la force des samskaras passés, il se sentira humilié et implorera la grâce de Bhagavan. Même en faisant part à de telles expériences, un dévot ne s’absorbera pas dans le plaisir des sens car son esprit est établi dans le service, ce qui est une source de satisfaction supérieure.
Après avoir élaboré ces symptômes de la shraddha, Shri Jiva Gosvami apporte une clarification concernant le verset 9.30 de la Bhagavad Gita. Ce verset ne doit pas être mal interprété comme une licence pour s’engager dans un comportement immoral. Il met plutôt l’accent sur la grandeur de la dévotion exclusive à Bhagavan en décrivant son pouvoir d’exalter même le plus bas des individus. De ce fait, cela implique que ce mauvais comportement doit être rejeté. Il est également compris d’après le verset suivant qu’une fois qu’un dévot est établi dans la vertu, un tel comportement sera abandonné. De plus, un tel mauvais comportement est une offense au saint nom, comme indiqué dans ce verset : « Pour celui qui commet intentionnellement des péchés en comptant sur la force du saint nom, les moyens de sa purification par le biais des règles n’existent tout simplement pas ».
Dans ce contexte, Shri Jiva Gosvami fait une observation précise concernant la déclaration de Krishna dans le verset 9.30 de la Bhagavad Gita qui dit : « Si même une personne qui se conduit extrêmement mal M’adore avec une dévotion exclusive, elle doit être considérée comme véritablement vertueuse, car elle est bien résolue. » Il écrit que le dévot dont il est question dans ce verset, au comportement abominable, n’est pas un dévot ayant une shraddha fondée sur les shastras, mais plutôt, sa shraddha est acquise par convention sociale (loka-parampara). C’est le type de shraddha décrit dans la Bhagavad Gita 17.1-4. Un dévot dont la foi est enracinée dans les écritures (shastriya-shraddha) ne s’engagera dans aucun acte interdit par les shastras. C’est la signification même de la shastriya-shraddha. Ainsi existe-t-il deux types de shraddha : l’une fondée sur les shastras et l’autre, sur la convention sociale. La plupart des dévots ont actuellement un mélange des deux.
C’est pour les personnes dotées de shastriya-shraddha que Krishna ordonne l’abandon du karma et l’engagement exclusif dans la bhakti. Par conséquent, les déclarations des shastras conseillant de ne pas déranger l’esprit des personnes engagées dans le karma, comme dans la Bhagavad Gita 3.26, et ceux qui recommandent l’abandon du karma, comme dans le Bhagavata Purana 11.20.9, sont destinés à deux classes de personnes différentes. Le premier type d’instruction est destiné à ceux qui n’ont pas de shastriya-shraddha dans la bhakti, et le second est destiné à ceux qui ont acquis la shraddha.
Il apparaît clairement de cette analyse que la shastriya-shraddha ne peut pas se manifester chez une personne qui n’a pas la connaissance des shastras. Seuls ceux qui ont entendu les shastras d’un enseignant qualifié peuvent avoir la shastriya-shraddha, non les autres. C’est à ceux qui ne connaissent pas les shastras que Krishna donne l’instruction de ne pas les inciter à abandonner le karma (BG 3.26). Ils devraient d’abord être inspirés pour écouter les shastras. S’ils deviennent curieux au sujet des shastras, il faudrait leur donner la connaissance des shastras et ensuite leur conseiller d’aller vers la bhakti. Si, cependant, ils ne veulent pas entendre les shastras, ils ne devraient pas recevoir de connaissances shastriques, sinon ce serait une offense de la part de celui qui instruit.
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