Le guru-seva est la clef du succès

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Dans l’anuccheda 236 du Bhakti Sandarbha, Shri Jiva Gosvami explique que l’abandon à Bhagavan est la première étape vers la pure dévotion. Cependant, Bhagavan n’est pas directement disponible pour nous. Alors, comment pouvons-nous nous abandonner à Lui ? Quelle est la preuve que nous sommes vraiment abandonnés ? Il n’est pas facile pour notre ahankara de s’abandonner car la nature même de l’ahankara est contraire à l’abandon. Ainsi, il est possible pour l’ahankara de rationaliser son non-abandon comme un abandon. Il n’est pas facile de voir ses propres défauts. Pour surmonter cette difficulté, l’abandon et le service au guru sont recommandés. Le guru est le critère déterminant de l’abandon. Sans servir directement le guru, l’on peut rester dans l’illusion de l’abandon et même en convaincre les autres. Par conséquent, l’abandon et le service au guru ont été recommandés à plusieurs reprises par les shastras. C’est le sujet de l’anuccheda 237 du Bhakti Sandarbha. Ci-dessous je présente la traduction de cet anuccheda suivie de mon commentaire.

Traduction de l’anuccheda 237

Nous avons ainsi décrit l’acte de dévotion qu’est l’abandon (saranapatti). L’abandon est la première étape de la dévotion à entreprendre car sans elle, il est impossible d’atteindre le sentiment d’appartenance à Bhagavan (tadiyatva). À cet égard, il est établi que toute perfection s’effectue simplement par l’abandon, comme cela est indiqué dans le Garuda Purana :

śaraṇaṁ taṁ prapannā ye dhyāna-yoga-vivarjitāḥ 
te vai mṛtyum atikramya yānti tad vaiṣṇavaṁ padam

« Ceux qui ont abandonné les chemins de la méditation et du yoga, et se sont réfugiés en Toi surmonteront certainement la mort et atteindront la demeure suprême de Bhagavan Shri Vishnu ». (GP 1.227.36)

Malgré cela, cependant, si quelqu’un aspire à goûter une saveur particulière d’amour et a la capacité de le faire, il doit constamment et avec détermination offrir le service aux pieds de lotus d’un guru, qui est capable d’instruire quelqu’un sur les conclusions confidentielles des écritures concernant la dévotion ou qui initie au mystère des mantras ayant trait à Bhagavan. En effet, la grâce du guru est la cause première permettant d’éliminer toutes les souillures indépassables (anarthas) qui ne peuvent être surmontées par aucun effort personnel et d’obtenir la miséricorde suprême de Bhagavan.

Dans le septième chant du Shrimad Bhagavatam, Shri Narada donne un exemple du premier de ces deux points, à savoir comment la miséricorde de son guru instructeur est la cause première de l’élimination de toutes les souillures :

asaṅkalpāj jayet kāmaṁ krodhaṁ kāma-vivarjanāt 
arthānarthekṣayā lobhaṁ bhayaṁ tattvāvamarśanāt 
ānvikṣikyā śoka-mohau dambhaṁ mahad upāsayā
yogāntarāyān maunena hiṁsāṁ kāmādy anīhayā
kṛpayā bhūjanaṁ duḥkhaṁ daivaṁ jahyāt samādhinā 
ātmajaṁ yoga-vīryeṇa nidrāṁ sattva-niṣevayā 
rajas tamaś ca sattvena sattvaṁ copaśamena ca
etat sarvaṁ gurau bhaktyā puruṣo hy añjasā jayet

« Il faut vaincre le désir en abandonnant l’esprit de jouissance, la colère – en abandonnant le désir, l’avidité – en discernant les défauts de la richesse, la peur – en contemplant la nature de la vérité, la lamentation et l’illusion – en faisant la distinction entre la réalité et l’apparence, la tromperie – en servant les sages, les obstacles au yoga – par la pratique du silence, la violence – par indifférence au désir, la misère née du contact avec d’autres êtres – par le pardon, la misère issue des forces de la nature – par la conscience transcognitive (samadhi), les misères liées à son propre corps et l’esprit – grâce au pouvoir du yoga, le sommeil – en adoptant les codes de conduite sattvikas, les états qualitatifs de distraction (rajas) et l’indolence (tamas) – à travers l’illumination matérielle (sattva), et l’illumination matérielle (sattva) – par le détachement. Une personne peut facilement conquérir tout cela par la bhakti envers son maître spirituel ». (SB 7.15.22-25)

En ce qui concerne le deuxième des éléments mentionnés ci-dessus, à savoir comment la grâce du mantra-guru est la cause première permettant d’obtenir la miséricorde suprême de Bhagavan, nous trouvons la déclaration suivante de Brahma dans le Vamana-kalpa :

yo mantraḥ sa guruḥ sāksād yo guruḥ sa hariḥ svayam 
gurur yasya bhavet tuṣṭas tasya tuṣṭo hariḥ svayam

« Le mantra est directement le guru, et le guru est Bhagavan Hari Lui-même. Bhagavan Hari est personnellement satisfait d’une personne dont le guru est satisfait ».

Ailleurs dans le même texte, il est dit :

harau ruṣṭe gurus trātā gurau ruṣṭe na kaścana 
tasmāt sarva-prayatnena gurum eva prasādayet

« Si Bhagavan Hari est mécontent, le guru peut offrir une protection, mais si le guru est mécontent, personne ne peut fournir de protection. Par conséquent, on devrait faire tous ses efforts pour satisfaire son guru ».

Par conséquent, servir son guru est en effet un devoir régulier, comme le déclare Bhagavan dans le texte suivant :

prathaman tu guruṁ pūjya tataś caiva mamārcanam
kurvan siddhim avāpnoti hy anyathā niṣphalaṁ bhavet

« On ne devrait M’adorer qu’après avoir d’abord adoré son guru. En faisant cela, on atteint la perfection, sinon ses efforts s’avèrent vains ».

Ainsi est-il dit dans le Narada-Pancharatra :

vaiṣṇavaṁ jñāna-vaktāraṁ yo vidyād viṣṇu-vad gurum
pūjayed vāṅ manaḥ kāyaiḥ sa śāstrajñaḥ sa vaiṣṇavaḥ
śloka-pādasya vaktāpi yaḥ pūjyaḥ sa sadaiva hi
kiṁ punar bhagavad-viṣṇoḥ svarūpaṁ vitanoti yaḥ

« Celui qui considère un guru Vaishnava, qui est un précepteur de la connaissance transcendantante, comme Vishnu Lui-même, et qui l’adore avec son corps, son esprit et sa parole, est un vrai connaisseur des shastras, tout comme il est un Vaishnava ».

Même un enseignant qui n’explique qu’un quart d’un verset de la vérité scripturaire est certainement toujours digne d’adoration, alors combien plus cela doit-il être le cas pour un guru qui révèle la nature essentielle (svarupa) de Bhagavan Vishnu !

Dans les prières de Devadyuti se trouvant dans le Padma Purana, nous trouvons cette déclaration :

bhakti yathā harau me’sti tad-variṣṭhā gurau yadi 
mamāsti tena satyena sandarśayatu me hariḥ

« Si ma dévotion envers mon guru surpasse ma dévotion envers Bhagavan Hari, alors par la force de ce fait, que Bhagavan Hari se révèle directement à moi ».

Par conséquent, pour une personne ainsi dévouée à son guru, il n’est pas nécessaire d’appliquer une autre branche de dévotion, comme cela est indiqué dans la section de l’écriture agama décrivant les résultats de la cérémonie du purashcarana :

yathā siddha-rasa-sparśāt tāmraṁ bhavati kāñcanam
sannidhānād guror evaṁ śiṣyo viṣṇu-mayo bhavet

« De même qu’au contact du mercure traité le cuivre se transforme en or, de même un disciple acquiert la nature divine de Vishnu en étant en compagnie avec son guru ».

Dans sa discussion avec Shridama, Bhagavan Krishna a confirmé le même point en disant que les autres branches de la dévotion ne sont pas nécessaires pour celui qui est dévoué à son guru :

nāham ijyā-prajātibhyāṁ tapasopaśamena vā 
tuṣyeyaṁ sarva-bhūtātmā guru-śuśrūṣayā yathā

« Moi, le Soi qui se trouve dans tous les êtres vivants, Je ne suis pas aussi satisfait par les sacrifices, ni par une noble naissance, ni par des pénitences, ni par l’équanimité  de l’esprit, comme Je le suis par le service offert à un guru par son disciple ». (SB 10.80.34)

Shridhara Svami commente : « Il n’y a personne de plus digne de service qu’un guru qui confère la connaissance transcendante. Cela a déjà été dit. Par conséquent, il n’y a pas de devoir religieux plus élevé (dharma) que de le servir. Le présent verset est prononcé pour élucider ce point. Le mot ijya, ou « un sacrifice védique », fait référence aux devoirs d’un chef de famille (grihastha-dharma). Le mot prajatih, « une noble naissance », fait référence à la naissance élevée dans laquelle l’on est initié à l’étude des Vedas en acceptant le cordon sacré (upanayana). Cela fait référence aux devoirs d’un étudiant célibataire (brahmacari-dharma). Puisque ces deux (ijya et prajati) apparaissent dans un mot composé, la terminaison de l’instrumental s’applique aux deux, c’est-à-dire « par ces deux » (tabhyam). Le mot tapasa, « par des pénitences », signifie « par les devoirs de celui qui s’est retiré dans la forêt » (vanastha-dharma) et upasamena, « par l’équanimité de l’esprit », signifie « par les devoirs d’un ascète » (yati-dharma). Krishna déclare : “ Moi, Parameshwara, bien que situé [impartialement] en tant que le Soi Suprême dans tous les êtres vivants, Je ne suis pas aussi satisfait de toutes ces pratiques que Je le suis du service offert à son guru”». Ici se termine le commentaire de Shridhara Svami.

La connaissance transcendante (jnana) conférée par le guru, telle que mentionnée dans le commentaire de Shridhara Svami, peut être de deux types : celle qui appartient au Brahman ou celle qui appartient à Bhagavan. Au cas où le jnana se rapporte au Brahman, l’explication des mots dans ce verset est celle donnée ci-dessus. Dans le second cas, cependant, les mots doivent être compris comme suit : l’ijya ferait référence au culte de Bhagavan (puja), le prajati à l’initiation (diksha) à un mantra de Vishnu, le tapah à la conscience transcognitive de Bhagavan (samadhi), et l’upashama à l’état de fixité inébranlable (nishtha) dans Bhagavan.

Commentaire

Dans cet anuccheda, Shri Jiva Gosvami révèle la formule secrète du succès. Cela implique un service offert à son guru venant du fond du cœur sans prétention aucune et sans désir aucun de recevoir quoi que ce soit en retour. Cette formule est vraie pour tous les chemins mais surtout pour celui de la bhakti et elle est obligatoire pour la raganuga-bhakti. Bien que des millions de personnes se mettent à pratiquer la spiritualité, à peine une seule atteindra le but proclamé et souhaité. La raison en est qu’ils n’appliquent pas cette formule secrète.

Si un contradicteur (purva-pakshi) devait analyser les spiritualistes d’un point de vue purement logique, il pourrait conclure que leurs revendications sont sans fondement. En effet, il y a beaucoup de non-croyants qui font de telles déclarations et beaucoup d’autres qui les acceptent en silence. Le faible taux de réussite parmi les personnes qui s’adonnent à la spiritualité peut être comparé à celui d’un agriculteur qui plante un million de manguiers et dont un seul produira des fruits. Cela pourrait difficilement être considéré comme un modèle               d’agriculture qui a réussi et l’on douterait sérieusement de suivre un tel modèle d’agriculture ou de le recommander à d’autres personnes. Cependant, au lieu de conclure que les manguiers sont impropres à la production fruitière, il faut s’interroger sur le mode de culture utilisé.

Le même principe est d’autant plus vrai en ce qui concerne la culture de la vérité spirituelle. Lorsque les fruits d’un tel engagement sont perçus comme maigres, l’on devrait plutôt deviner que les pratiquants font quelque chose d’incorrect et non pas penser que la spiritualité est fictive. Cela est dû au fait que les shastras auto-révélés sont infaillibles. Les shastras sont soit les paroles directes de Bhagavan, soit celles des sages spirituellement réalisés qui ont perçu vu la Vérité. C’est un savoir sans faille transmis pour le plus grand bien de l’humanité. Cependant, pour qu’il porte ses fruits, il doit être appliqué selon les prescriptions. Nous ne pouvons pas nous attendre à ce qu’un résultat approprié découle d’une procédure défectueuse et qu’une procédure correcte soit appliquée sans une connaissance appropriée. Une bonne connaissance vient d’un guru authentique, en étudiant avec lui selon la méthode recommandée. C’est le maillon manquant dans la chaîne du succès pour atteindre la bhakti. Shri Jiva Gosvami souligne que le service offert à son guru est si puissant que toute la perfection peut être atteinte simplement par cela seul, même si le pratiquant ne participe pas aux autres activités de la bhakti. Auparavant, il a été dit que le succès dans la bhakti pouvait être obtenu simplement en pratiquant l’une de ses branches ou en combinant quelques-unes d’entre elles. Mais parmi toutes ces activités, le service à son guru n’est pas facultatif. Quelles que soient les méthodes que nous adoptions, elles doivent inclure cette pratique fondamentale. À cet égard, nous trouvons la déclaration suivante dans le Hari-bhakti-vilasa :

guru-mūlam idaṁ sarvaṁ tasmān nityaṁ guruṁ bhajet 
puraścaraṇa-hīno’pi mantrī siddhyen na saṁśayaḥ

« Toutes ces pratiques [de mantra-méditation et ainsi de suite] sont enracinées dans le guru. Par conséquent, il faut servir son guru régulièrement. Ainsi, le pratiquant du mantra peut atteindre la perfection même sans entreprendre les rites préparatoires [qui sont normalement] obligatoires, connus sous le nom de purascarana. De cela, il n’y a aucun doute ». (VHB 17.242)

L’importance de prendre refuge auprès d’un guru a été expliquée dans l’anuccheda précédent. Ici, l’importance du service offert à son guru a été soulignée. Dans le Vamana-kalpa, il est dit que si Bhagavan devient mécontent d’un pratiquant, le guru de ce dernier peut offrir une protection, mais si le guru est mécontent, même Bhagavan ne peut pas aider car Lui-même a confié ce pouvoir au guru. Il n’a pas l’intention qu’un aspirant spiritualiste contourne le guru et l’approche directement.

Tout d’abord, le futur disciple doit faire ses preuves auprès du guru. Le guru est le terrain d’essai. Un acteur, par exemple, doit répéter avant de monter sur scène. De même, le futur disciple doit répéter avec son guru avant d’être autorisé à entrer dans le jeu divin de Krishna. Une fois que le guru est satisfait, l’on obtient le visa requis pour entrer dans le royaume de Bhagavan. Le guru authentique est ainsi comme un ambassadeur du royaume de Bhagavan. Pour cette raison, les écritures indiennes accordent une grande importance au principe du guru-seva

À cet égard, le Mahabharata (« Adi-parva », troisième chapitre) commence par les histoires de quatre étudiants – Aruni, Upamanyu, Veda et Uttanka – et les services qu’ils ont offerts à leurs gurus. Ces histoires mettent en lumière la culture prédominante de la guru-bhakti dans les temps anciens, dont on peut encore être témoin à l’heure actuelle, bien qu’elle soit devenue de plus en plus rare. Même Krishna, qui est appelé jagad-guru, « l’enseignant universel », est allé vivre dans l’ashrama de son guru, Sandipani Muni, et lui a offert du service. Cela a été fait simplement pour donner l’exemple aux gens en général.

Pourtant, il y a beaucoup d’enseignants qui préconisent que nous n’avons pas besoin d’un guru ou que nous sommes notre propre guru. C’est comme dire : « Je n’ai pas de langue dans ma bouche ». En premier lieu, si cela était vrai, comment la personne pourrait-elle faire pour le dire ? Si un guru n’est pas requis, alors pourquoi de tels défenseurs adoptent-ils la position d’enseignants et contredisent ainsi leur propre déclaration ? Si leurs paroles sont acceptées, ils deviennent alors des gurus aux yeux de leurs adeptes. Si nous rejetons de tels enseignements, alors nous devrions prendre un guru. Dans les deux cas, accepter un guru est inévitable.

Selon le Narada-Pancharatra, il faut respecter chaque enseignant dont nous recevons les enseignements, et non seulement le diksha-guru. À cet égard, Chanakya écrit :

ekākṣara-pradātāraṁ yo guruṁ nābhivandate 
śvāna-yoni-śataṁ gatvā cāṇḍāleṣv abhijāyate

« Celui qui ne respecte pas un guru qui a enseigné le sens ne serait-ce que d’une seule syllabe prendra naissance en tant que chien pendant cent naissances, puis en tant que chandala, un hors-caste ». (Le Chanakya-niti 13.18)

Cela peut paraître extrêmement exagéré, mais l’accent est mis sur l’importance accordée au fait d’accepter un guru et de le respecter.

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